De Fez à Catane par mer
Elaborées sans doute à partir de quelques récits d’ambassades et de voyageurs, nourries vraisemblablement par une germination qui a fait sourdre dans la littérature « une épidémie d’orientalia »(1), Les Orientales (2) de Victor Hugo n’échappaient pas à l’effervescence qui s’était faite autour d’un pôle brusquement devenu à la mode : l’Orient. Les écrivains l’avait investi jusqu'à faire de lui un thème littéraire. Et l’on conçoit assez, l’exotisme aidant, un Victor Hugo écrivant des odes d’une saveur orientale, témoignant d’une pensée qui, à partir des années 1828, s’est élaborée pour parvenir à une vision puissante d’un Orient somptueux, mystérieux, mais cruel à souhait. La première tâche de l’auteur des Orientales devait être de fournir un témoignage sur la vie et l’âme des orientaux, comme sur les beautés pittoresques de la nature. Hormis quelques belles valeurs, le goût de la violence dans les moeurs y est largement cultivé. Et comme pour prolonger le « Giaour » de Byron, Hugo nous livre une suite de poèmes dont les titres seuls nous édifient : « Le cri de guerre du mufti », « la douleur du pacha », la « chanson de pirates », « la captive », « la bataille perdue », et d’autres pièces encore qui sont une évocation frappante d’un Orient d’une éternelle tragédie. Pour Hugo, dit Edward Saïd, « la férocité et la mélancolie désordonnée des Orientaux étaient médiatisées, non par une crainte réelle pour leur vie ou un sentiment de perte désorienté, mais par Volney et George Sale, dont les ouvrages savants traduisaient la splendeur des barbares en informations utilisables pour le talent sublime du poète » (3).
L’Orient auquel renvoient certains poètes qui ne l’avaient du reste jamais visité, et qui entretenaient leur passion par la lecture de chroniques et de relations, est un Orient piquant, conventionnel, voire menaçant ; un Orient qui avance comme disait Jules Michelet, « invincible, fatal aux dieux de la lumière à cause du charme de ses rêves, de la magie de son clair-obscur » (4). Même si Hugo n’a jamais été du voyage, il a pour sa part, contribué à cette imagerie frôlant parfois le pédantisme dédaigneux. Il lui manquait à la vérité, la patience de l’information sûre ; le discernement dans la recherche des sources, le scrupule qui empêche de produire des assertions sans preuves. On constate d’ailleurs que le goût de la vérité historique a peu de chose à voir dans ce recueil. Hassan El Nouty note d’ailleurs à ce propos que « les velléités de documentation chez Hugo ne sont en définitive guère (...) sérieuses(...) ( Il ) illustre les conséquences néfastes de l’asservissement de l’histoire aux besoins des passions et des préjugés » (5). Mais, à trop insister sur ce fait, on risque d’en méconnaître l’ambition fondamentale du poète et de faire croire que toute l’œuvre est pure négation. La « chanson de pirates » a-t-elle été inspirée par la relation d’un voyageur ? Est-elle issue d’une réminiscence d’une gravure (ou d’un tableau) ? Une influence orientale est d’autant plus probable puisque vogue bien établie et déjà séculaire. Et l’on veut pour preuve la traduction des Milles et une nuits par Antoine Galland (1704-1717) et le célèbre Kubla Kahn (1797) de Samuel Taylor Coleridge des Ballades lyriques (1798) qui marquèrent en leur temps l’avènement du romantisme. En tout cas, l’intérêt du poète pour cette partie du monde est manifeste. Dans la préface de l’édition originale des Orientales (janvier 1829), on peut lire :
« Les études orientales n’ont jamais été poussées si avant. Au siècle de Louis XIV on était helléniste, maintenant on est orientaliste. Il y a un pas de fait (...) Il résulte de tout cela que l’Orient, soit comme image, soit comme pensée, est devenu, pour les intelligences autant que pour les imaginations, une sorte de préoccupation générale à laquelle l’auteur de ce livre a obéi peut-être à son insu. Les couleurs orientales sont venues comme d’elles-mêmes empreindre toutes ses pensées, toutes ses rêveries ; et ses rêveries et ses pensées se sont trouvées tour à tour, et presque sans l’avoir voulu, hébraïques, turques, grecques, persanes, arabes, espagnoles même, car l’Espagne c’est encore l’Orient » (p.403).
Cette préoccupation générale n’a épargné ni Walter Scott, ni Chateaubriand, ni encore Goethe ou Schlegel. D’autres prendront le relais : Nerval, Flaubert, Maupassant, Loti pour lesquels l’Orient va devenir réalité et source de poésie. Or, l’analyse n’est jamais simple constatation ni description, ni impression.
On sait avec quelle ardeur, trop souvent partiale, Sainte-Beuve s’est attaché à l’œuvre de Hugo, remarquant les beautés et les défauts qui émaillent ça et là dans les pièces de ce recueil, l’incorrection et les licences du style, notant par ailleurs que celui-ci « ne blesse jamais la grammaire ni le vocabulaire de la langue, et ne présente ni mots ni tours inusités. Les fautes habituelles sont des fautes de goût (...) : de la trivialité pour du naturel, du S’il est intéressant d’étudier la manière dont un poète écrit, il peut être tout aussi intéressant d’observer comment il puise dans les différentes versions et les variantes connues pour en tirer souvent la signification du texte définitif, comment il s’arrange à mettre quelque chose de lui-même dans n’importe quel sujet, comment il étaye ses convictions et durcit certaines images jusqu'à tomber dans l’excès et l’adultération.
En dépit de la volonté de dérision qui anime la « Chanson de pirates », le « captif d’Ochali » ne manque pas d’entrain. Pour sacrifier au genre, Hugo donne ici l’illustration de ce qui n’aurait peut-être existé que dans son imagination :
« Nous emmenions en esclavage
Cent chrétiens, pêcheurs de corail ;
Nous recrutions pour le sérail
Dans tous les moûtiers du rivage.
En mer, les hardis écumeurs !
Nous allions de Fez à Catane...
Dans la galère capitane
Nous étions quatrevingts rameurs. » (p.450).
Le plus inattentif des lecteurs s’en tiendra là, à cette innocence avec laquelle le poète aborde ce voyage et raconte les faits : les « hardis écumeurs » allaient « de Fez à Catane », par mer ! L’expression paraît d’abord forcée, anecdotique même, malgré l’assurance avec laquelle celui-
ci s’exprime. Et l’on est bien obligé de convenir que cette image dérange celui qui connaît le Maroc et la ville de Fès en particulier. Comment ne pas être choqué par l’audace qu’elle imprime au poème ? Nous voilà obligés de regarder ce texte d’un regard autre. Notre confort et notre désinvolture de lecteur sont mis à rude épreuve. Mais l’audace convoque cependant quelques commentaires et suscite de vives questions. Quel crédit l’historien peut-il accorder à cette allégation ? La véracité du propos demande la vérification par les preuves qui doivent entraîner peu à peu la conviction. On peut certes contester l’idée que Fès fut, par le passé, port de mer, mais on ne peut soutenir sérieusement, après avoir lu quelques chroniques d’historiens arabes, que la ville ne le fut point. Et c’est ce que nous tenterons de vérifier. On peut critiquer les propos du poète. On peut douter que même par hypothèse il soit possible de voyager par mer, de « Fez à Catane ». Aussi, l’itinéraire qui paraît en lui-même insolite n’a pas manqué de piquer au vif Marcel Jay, rétorquant par des vers à « la fantaisie » de Hugo :
« Hardis, certes, si ce voyage
Se fit sur l’eau de bout en bout,
Car Fez, loin du marin rivage,
N’est même pas sur le Sebou.
................................................
Le poète a toujours raison. (7)
Nous pouvons bien admirer ici cet « affront », et cependant ne pas faire grief à l’auteur de ne l’avoir pas eu. Comment ne pas réagir à cette boutade proclamée sur le mode triomphal comme une victoire sur l’ignorance ? Si « Fès n’est même sur le Sebou », il est loisible de comprendre l’étonnement de l’auteur de ces vers. Mais rien ne nous empêche aussi de poser en commençant la question de la sincérité du poète. Remontons alors un peu au Maroc romain, et prenons l’itinéraire d’Antonin qui fit partir deux tracés : l’un d’Ad Mercurios (8), l’autre de Tocolosida (9). Le routier romain énumérait les villes et les postes pour les fonctionnaires, les troupes, les commerçants et les voyageurs romains. En partant de Tingi (10), il suivit la voie du littoral, rencontra Zili (l’actuelle Azila), puis Taberne (11), Lixus (12), Frigidis (13) puis Banasa où l’on retrouva, lors de fouilles, une petite barque votive, en terre cuite (14) ; Banasa qu’Antonin situe sur la rive gauche de l’oued Sebou ; ce grand fleuve que Pline l’Ancien qualifiait de « magnificus et navigabilis »(15). La voie suivie traverse Thamusida (16), Sala (17) et se prolonge jusqu'à Ad Mercurios.
Le Sebou est donc un fleuve navigable. Et l’on veut pour preuve, un autre témoignage, celui de l’historien Ali el-Gueznâyi (18) qui a vécu au XIVème siècle et qui a laissé une œuvre très bien documentée sur l’histoire de Fès et de ses monuments, publiée en arabe sous un titre poétique Cueillette des fleurs de myrte, suivi d’un sous-titre : A propos de l’édification de la ville de Fès. Ce texte a été traduit et publié à Alger en 1923. L’auteur nous apporte une révélation majeure sur le plan des faits :
« La proximité du fleuve Sebou, sur lequel peuvent voguer les barques et les petits navires jusqu'à l’océan et qu’ils peuvent remonter de l’océan jusqu’au confluent de l’oued Fès, est aussi un avantage » (19).
D’une manière générale, il semble que cette information confirme le témoignage de Pline l’Ancien : le fleuve est navigable, mais ses méandres ne traversent pas Fès. Or il y a cette proximité dont il faut prendre note, en dépit du fait qu’on peut fort bien venir dans la ville par voies associées ; mer puis terre. L’ambassade envoyée au Maroc en 1560 par Antoine de Bourbon, roi de Navarre semble bien le confirmer. Le témoignage de Geoffroy de Buade qui faisait partie de cette mission qui débarqua à Agadir avant de rejoindre Fès par voie de terre, semble catégorique. Il est dit qu’après les négociations avec le sultan, la mission s’en retourna en barque à Agadir où un navire l’attendait, laissant Le sieur De Buade malade, dans l’impossibilité de voyager. Une fois rétabli, ce dernier s’embarqua sur « un navire de Marseille qui était venu au dit Fès en marchandise ; ce navire avait affaire en cette ville pour charger des tonneaux pour Marseille » (20).
Evidemment, il y a dans l’insertion que l’on vient de lire une précision qui converge vers l’information principale, attestée ici par deux témoignages. Elle ne peut donc être mise facilement en doute. Dans des documents, relativement peu connus, nous pouvons encore trouver d’autres indices. La question a occupé, hier encore - au temps du protectorat - plusieurs missions pour étudier la possibilité de l’utilisation du Sebou pour une certaine navigation. En 1901, Edmond Doutté eut ce mot dans les ruines délabrées de Mehdia : « Nous revenons en haut du village et de là nous contemplons la nappe d’argent du Sebou, ce grand fleuve navigable, ce chemin ouvert dans la direction de Fez et son bel estuaire dont notre pays (la France) fera peut-être un jour un port » (21).
« Chemin ouvert ». Ce mot dit ici beaucoup plus que ce qu’il signifie. C’est qu’on nous désigne un passage qu’il faut considérer. Il faut en dire ce que disait l’enseigne de vaisseau Le Dantec, quelques années plus tard, à propos de l’exploit d’amener jusqu’au pont du Sebou un canot calant 80 centimètres (22). Mesurons encore une fois l’énormité de l’exploit ! Nous ne pouvons qu’être étonnés d’entendre quelque chose de ce genre, car l’événement en lui-même est important. Mais de là à « accoster à Fès », c’est poser un problème que nous ne pouvons qu’indiquer. Définir l’emplacement du port qui suppose tout un aménagement pour recevoir les vaisseaux, pour charger et décharger les marchandises, c’est arracher au sol les secrets qui y sont enfouis. Il faut en convenir, il est difficile de tirer dès maintenant des conclusions solides de cette possibilité. Mais elle n’en reste pas moins singulièrement suggestive. Outre le culte de l’eau qu’a développé le Fassi à travers les siècles et que Pierre Dumas célébra en de belles pages (23), il reste encore un point de vue surprenant et insolite sous lequel « Fès port de mer » mérite d’être étudiée. C’est celui de l’établissement de chantiers de constructions navales sur le Sebou et à proximité de la ville. L’idée a, en soi, quelque chose d’invraisemblable. Pourtant, Ali el-Gueznâyi, en donne la preuve, se permettant même d’en d’indiquer le lieu exact: vingt guerriers ; le second était un challir, portant soixante guerriers. Ils furent lancés sur le fleuve Sebou et naviguèrent jusqu'à El-Ma’môra (24) qui dépend de Salé. Ceci eut lieu (25) en l’an 756 (1355 ap. J.-C) ».
Ce faisceau d’indices et de témoignages est probant : l’existence d’un chantier de constructions navales aux environs de Fès n’a, en soi, rien de surprenant s’il l’on considère deux faits : d’abord les forêts voisines des Beni-Yâzgha et des Behâlil pouvaient fournir le bois nécessaire pour les embarcations. Le chêne et le cèdre y étaient abondants, ainsi que le goudron et la résine. Ensuite, il est utile de préciser que les Béni-Yâzgha étaient connus pour la culture du chanvre, élément important qui rentre dans la confection des cordages et des étoupes. Naguère, l’abondance des matériaux de construction faisait que des villes étaient plus aptes que d’autres à constituer des flottes. El Idrissi (XIIème siècle) le note pour Bougie. En comparaison avec cette principauté maritime, Ibn Idhâri dans son Bayâne El-mogrib attire plutôt l’attention sur l’indigence de Mehdya (26). L’autre fait significatif tient fatalement de la main d’œuvre. Fès a toujours été une ville d’artisans où le travail de la céramique, du bois et du fer était toujours florissant ; en témoignent les merveilles d’architecture et d’art, les salles de cèdre, les chapiteaux sculptés, les plafonds à caissons, les colonnettes sculptées et peintes, les revêtements splendides qu’on trouve dans les palais et les belles demeures fassies. Dans Le Roudh-El-Qirtas qui a pour sous-titre « Histoire des souverains du Maroc et annales de la ville de Fès », l’auteur donne quelques chiffres qui montrent l’importance de la ville sous le règne d’El-Mansour l’Almohade et leur expansion sous le règne de Nasser : « Fès avait, nous dit-on, 89.236 maisons, 467 auberges (fondouks), 9.082 boutiques, 2 bazars, 3.064 fabriques, 117 lavoirs, 86 tanneries, 116 teintureries, 136 fours à pain, 1.170 fours divers, 4.000 fabriques de papier » (27). Il n’est pas étonnant donc que les mains des artisans se soient occupé aussi à construire des bateaux pour le commerce et la guerre.
Les précisions sans nombre que les historiens ont réunies nous poussent à réviser l’image qu’on se fait d’ordinaire de Fès qui fut le foyer à partir duquel rayonnèrent les valeurs qui ont conquis le monde arabo-berbère. Il y a aussi l’autre aspect à considérer : admettre que ces témoignages qui font prévaloir l’humilité documentaire et la probité intellectuelle, sont une réponse aux détracteurs, qui partant du propos fort discutable : « De Fez à Catane / Dans la galère capitane », ont demandé, ironiquement au poète d’en donner la preuve. Voilà ce que nous apprend un petit article accrocheur sous le titre « A propos de ‘La bouteille à la mer’ » paru dans les « Echos » du Mercure de France (28) et signé par le commandant B. de Ras T’bouda (29) qui reprend la remarque avec réticence et demande à être édifié sur les connaissances géographiques de monsieur Hugo et la technique de ses vers. De cette apostrophe on peut attendre des résultats divers et importants, qui jetteront une précieuse lumière sur l’histoire du Sebou. On saura gré à M. Antraygues (30) d’avoir dans une étude sur les ports du Royaume -publiée dans l’Encyclopédie Coloniale et Maritime - , creusé sur quelques points l’essentiel, exposant quelques chiffres dont la considération est capitale :
« Le port de Port-Lyautey (Kénitra) est situé sur l’oued Sebou, à 17 km. De son embouchure ; il constitue un excellent port en rivière, le Sebou étant large de 250 m. et profond au droit des quais de 3m.60 à 4 m.60 sous les plus basses mers. La calaison admissible pour les navires remontant le Sebou varie de 4m.50 à 5m.50 suivant les marées. Méhédya, à l’embouchure du Sebou, fut choisie comme base de débarquement en avril 1911, lorsque le service des étapes organisa le ravitaillement de la colonne de Fès. Pratiqué déjà par les Phéniciens, dit-on, ce port avait connu au XVI° siècle, sous l’influence espagnole et portugaise, une grande activité » (31).
Curieuse destinée du Sebou, non point tant par son histoire qui remonte jusqu’aux phéniciens que par ses spécificités : largeur, profondeur, calaison pour certains types d’embarcations. Mais il n’est pas moins vrai de constater également avec J. Célerier (32) qu’il fallait renoncer à l’utiliser comme voie navigable car : « les innombrables méandres du Rharb allongent inutilement les transports cependant que l’irrégularité de la profondeur multiplie les échouages » (33).
Quelle que soit la qualité de certains écrits sur le Sebou, il est impossible de ne pas être frappé par le caractère de sa navigabilité, et cela malgré les réserves qui émanent de l’irrégularité de sa profondeur. Quoi qu’il en soit, il semble bien que Hugo ait voulu nous faire entrevoir quelque chose qui tient non d’un simple fait, mais d’un tableau de la diffusion d’une société et d’une civilisation. Si l’on se penche sur l’histoire de Fès et sur les plus anciens témoignages et les quelques allusions qui laissent dans une ombre mystérieuse les origines de cette ville et le détail de son histoire, on ne peut que se passionner pour cette énigme, avançant tantôt avec nos hésitations, tantôt avec nos contradictions, entraînés cependant dans une exploration dans le temps et dans l’espace à la recherche des traces d’une ville-port-de-mer (34). Mais si la vision du poète est personnelle et attachante ; elle n’en reste pas moins suggestive, ouvrant un chapitre nouveau et inédit sur la circulation des hommes et des choses en ce temps.
Evidemment, certains esprits feront la moue devant ce beau morceau de désinvolture qui s’avère être d’une remarquable lucidité. Une logique préside à cela. Et si celle-ci paraît insolite, le poète ne la cultive pas pour le plaisir. Sans doute, Hugo ne l’ignorait pas qui, faisant allusion à ce voyage de « Fez à Catane » par mer, convenait lui-même qu’il cédait à quelque chose qui tienne du creuset inavouable de la création. Mais on ne fait pas à un poète dont la santé poétique fut particulièrement florissante en cette époque, de critiques de détail. Cela dit, il faut se laisser porter au gré des vagues que nous suggère la « chanson de pirates » et dire avec Jean Ferrat : « le poète a toujours raison /Qui voit plus haut que l’horizon ... » .
Notes :
(1) Le mot est d’Edward Saïd. Cf. L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident. Préf. De Tzvetan Todorov. Trad. Par Catherine Malamoud, Paris, Seuil, 1980, p.67.
(2) Odes et Ballades. Les Orientales, Paris, Nelson Editeurs, 1935.
(3) Cité par Henri Baudet dans Paradise on earth : Some Thoughts on European Images of Non-European Man, New Haven, Conn., Yale Univ. Press, 1965 ; p.XIII.
(4) L’Orientalisme, Op.Cit., p.194.
(5) Le Proche-Orient dans la littérature française. De Nerval à Barrès, Paris, Librairie Nizet, 1958, pp.57-58.
(6) Les Poètes Romantiques II. Victor Hugo, Odes Orientales, Paris, Librairie Hatier, 1947, p.8.
(7) Le Figaro Littéraire, 25 juillet, 1925.
(8) Elle se situe à 24 kilomètres de Sala. Impossible toutefois de déterminer avec précision son emplacement. On sait seulement qu’il faut le situer sur la côte, puisqu’on s’y embarquait pour aller à Tanger. L’index des noms de lieux qu’on peut consulter dans les dernières pages de l’ouvrage Le Maroc chez les auteurs anciens (Voir supra, note 11) donne deux indications :
-Ad Mercurios. - à 16 milles au sud de Sala, probablement entre l’oued Ikem et l’oued Cherrat.
-Ad Mercurios. - à 18 milles au sud de Tingis. Aïn Bellita. (Dchar Djedid).
(9) Dans le Zerhoun, ruines à 4 km. 500 au sud de Volubilis, sur la route de Meknès. C’était la dernière station avant Volubilis.
(10)Tanger
(11) Ruines de Lalla Djilalia, à 21 kilomètres après Zili.
(12) Ville à 4 kilomètres de l’embouchure du Loukkos (Larache).
(13) « Les eaux froides », Frigidis (aquis). Ce simple poste militaire, Tissot le situe à Souier, entre Lixus et Banasa.
(14) Voir R. Thouvenot, Valentia Banasa, p.56.
(15) « At in ora a Lixo quinquaginta millia amnis Sububus, praeter Banasam coloniam defluens, magnificus et navigalis » (D’autre part, sur la côte, à cinquante mille pas de Lixus, le fleuve Sububus, qui coule à côté de Banasa, fleuve magnifique et navigable.)
(16) Voir Pline, Histoire naturelle, V, I. Source reprise dans Le Maroc chez les auteurs anciens. Textes traduits par Raymond Roger avec une Préface de Stéphane Gsell, Paris, « Nouvelle Collection de Textes et Documents », Société d’Edition « Les Belles Lettres », 1924, p.30.
(17) Ruines à Sidi Ali ben Ahmed, à 12 kilomètres de Kénitra (N.-O. du pays des Zemmours).
(18) Ville au sud de Rabat, sur les collines de Chellah.
(19) Né dans la tribu des Gueznaia, au nord de Taza. Il s’installa avec sa famille à Fès.
(20) Alfred Bel, 1923, pp.68-69. Le livre dans sa version arabe a été publié et annoté par les soins de Abdlouhab Ben Mansour, l’historien du royaume, à l’Imprimerie Royale, en 1991.
(21) Voir Les Sources inédites de l’histoire du Maroc, 1ère série : France, tome I, pp.203 et suivantes.
Missions Au Maroc. En tribu, Paris, Librairie Paul Geuthner, 1914, p. 409.
(22) Voir A. Bernard, Le Maroc, 5° éd. 1918, p.42.
(23) Le Maroc, Grenoble, Editions J. Rey -B. Arthaud, Succ’, 1928, pp. 162 et suivantes.
(24) Le traducteur souligne que ce lieu se trouve à l’est de Fès, en allant vers le Sebou. Un endroit, précise-t-il, y est même appelé l’Arsenal.
(25) Il s’agit de Méhédia, un port de Tunisie, situé à 50 kilomètres au Sud-Est de Sousse.
Sultan mérinide auquel on doit la fondation de la médersa qui porte son nom, Bou-‘Inâniya. Il régna de 1348 à 1358.
(26) La source thermale de Sidi Harazem était appelée, au Moyen Âge, Source de Khaoulân. Ce chantier de constructions navales devait donc se trouver dans les parages de l’actuel pont du Sebou où passe la route de Taza.
(27) Anciennement, El-Mehdiya, petit port à l’embouchure du Sebou, qui a donné son nom, à la forêt dite d’El-Ma’môra.
(28) 1357 marque une date : l’expédition qu’Aboû ‘Inân fit contre la Tunisie durant laquelle la flotte marocaine permit la prise rapide de Tunis.
(29) Cf. Georges Marçais, La Berbérie Musulmane et l’Orient au Moyen Age,Paris, Aubier, 1946, p. 218.
(30) Cf.Emile-Félix Gautier, Le Passé de l’Afrique du Nord, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1952, p.56
(31) 1er mai 1930, p.764.
(32) Simple hasard ou coïncidence heureuse, Ras Tébouda est située, justement, à moins de 15 kilomètres de Khaoulân où furent construits, aux dires de Ali El-Gueznayi, les deux vaisseaux de guerre qui descendirent le Sebou jusqu'à l’Océan. Le premier comptait 120 rames, le deuxième 60.
Chef du Service de la Marine Marchande et des Pêches Maritimes.
Maroc, sous la direction d’Eugène Guernier, Paris, Editions de l’Empire Français, 1948, p. 444.
(33) Professeur à l’Institut des Hautes Etudes Marocaines.
(34) « L’Idée de région géographique et les divisions naturelles du Maroc » in Maroc, Op.Cit., p.110.
Un tel sujet ne peut être traité sans mettre en question toutes les données historiques et leur évolution à travers les siècles. Pour ne pas rester au niveau de la documentation de seconde main, nous avons jugé utile d’insérer en annexe, dans sa version originale, le pertinent témoignage de Ali el-Gueznâyi pour son rapport direct avec notre sujet. Et quelle que soit l’attitude qu’on adopte à l’égard de cet historien du XIVème siècle, on ne peut ignorer sa place dans l’histoire et la valeur de son oeuvre.