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L’ENJEU DE L’APRES CORONAVIRUS


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L’ENJEU DE L’APRES CORONAVIRUS

De par le passé, le monde a connu des bouleversements systémiques. Avait-on tiré des leçons? Non. Comme si les protagonistes n’appartenaient pas moins à leur époque. On n’avait fait qu’accuser l’ambivalence de deux attitudes. D’un côté, la rhétorique de la provocation et de l’arrogance, et de l’autre, celle du fatum où l’on accepte l’horreur, dans une résignation illusoire. Triomphe de la pensée monolithique qui protège autant qu’elle opprime. A l’origine de toutes les catastrophes, il était aisé de les attribuer au ‘mektoub’, au lieu de les expliquer par l’anomie dans une société qui perdait chaque jour un peu plus ses repères. Nous avions confié à des simplets le soin de nous guider. En réalité, nous n’avions pas su lire dans les strates des crises qui ont traversé toute notre histoire, un enseignement pénétrant. Plutôt la barbarie que le doute, le dogmatisme que le pluralisme des opinions. Tant d’impudence nous donne aujourd’hui mille raisons d’abhorrer la brutalité d’un système de valeurs lâche, inepte, méprisable, dès lors voué aux gémonies. Le voilà qui réapparaît avec le projet de durer. La raison nous commande d’être dans la culture de la mobilisation. Faisons actionner girouettes et anémomètres! Soyons attentifs aux mouvements tectoniques! L’occasion nous a été donnée dans le confinement de nous interroger sur ce que nous sommes, sur ce que nous voulons en dépit des Cassandres qui ont déjà prédit pour nous calamités et toutes sortes de cataclysmes : crash boursier, récession, maladies à pathologies lourdes, guerres bactériologiques, guerres civiles, blitz nucléaire et d’autres catastrophes encore. L’affrontement serait imminent, entretenu dans la terreur et la haine de l’autre, le gêneur. Notre sens de la mesure nous incite d’emblée à un retour à soi décomplexé, nous invitant à poser quelques réflexions sur notre relation à l’altérité. La proxémie est désormais intégrée comme une planche de salut. Sans surprise, le monde et le fiasco qui en a résulté nous font vivre un décalage déconcertant. Conséquemment, des marques très visibles de faiblesse, d’apathie sont révélées au grand jour. Les préjugés et les conventions dévoilent par-dessus l’épaule, d’avantage un mal être qui exprime ce que nous savons déjà, sans parler du risque qui freine tout engagement. Nous avons compris que nous ne sommes pas infaillibles, que notre surdité n’est pas, à nos corps défendant, simplement factuelle ; elle est transhistorique. Nous pesons et valons si peu. Nous avons la folle illusion de croire que nous signifions quelque chose. Le sens est ailleurs. A s’en tenir aux faits, toute notre espèce a plié. Il a suffit d’une bactérie pour nous disqualifier. Elle a perturbé les tours de contrôle et fait voler en éclat tout notre savoir-faire et notre liberté avec. On fait de la vie quotidienne un triste spectacle. En prime, la planète tout entière se retrouve confinée ; écoles à l’arrêt, rassemblements interdits, restrictions de circulation, mosquées fermées, pèlerinage annulé; quarantaine à la clé et couvre-feux. Des mesures inédites auxquelles il fallait pour sûr s’adapter. Une rhétorique de guerre perverse accompagne tout ce cortège. Les chars paradent dans les villes. On parle d’état d’urgence, de frontières, d’ennemi, de premières lignes, de barrières, de masques, de morts, de fosses communes, et le champ lexical est beaucoup plus spectral. Qui l’aurait imaginé il y a quelques mois seulement ? Vassalisés, nous avons toujours été dans la plus pathétique des impuissances, incapables de résistance et de refus. Nous n’avons même pas la décence de désobéir, comme naguère, Henry David Thoreau et le Mahatma Gandhi, pour d’autres raisons. Déroutés par l’imprévisible, confinés dans la peur, nous sortons du lit pour le retrouver séance tenante. Du lit au lit comme dit la chanson ; en retrait de la ville opulente et maudite. Nous avons perdu notre difficile liberté et cela nous laisse moins d’honneur. Nous vivons désormais dans une discordance qui nous condamne à supprimer ce que nous aimons. Nous donnons un dernier coup de férule à certaines habitudes qui nous faisaient courir le bitume. A peine le temps est-il à nous. La rage de frétiller s’est estompée, s’en est allée. Nous pensons à l’après, à demain, au pire des cas nous spéculons, après avoir rompu avec l’insouciance d’un temps où les choses les plus évidentes commençaient à perdre toute signification. Les architectes d’un nouvel ordre mondial sont déjà à l’établi. Leurs planches n’attendent que la validation sigillée du grand manitou. On prépare pour nous un modèle, le plus sécuritaire qui soit, le plus liberticide ; gérontophobe à souhait. La ‘haine’ carnassière des vieux est justifiée avec violence. Nous avons dès à présent notre Narayama. Et nous ne sommes pas loin de l’eugénisme prôné pendant le troisième Reich. Combien nous aurons du mal à émerger ! Sortir de notre torpeur, mesurer les conséquences d’un chômage endémique avec les fermetures d’usines, d’entreprises ! Notre système de protection sociale est bel et bien dévitalisé, se révèle inapte pour ne pas dire obsolète. L’ampleur de la crise en a révélé les failles. Tout va être nivelé de fond en comble. Ceux qui sont censés nous informer et nous rassurer vont à hue et dia, se contredisent sans gêne sur l’autel médiatique. Le lobbying des industries pharmaceutiques témoigne d’une surdité inhumaine. Le constat général est pitoyable ; il augure d’un terrible basculement du monde. Ne nous réjouissons pas très vite ! La gestion de la nouvelle société en marche sera affectée aux machines, au pouvoir des puces électroniques. L’intelligence artificielle intégrera nos vies et dominera sans coup férir notre vieille espèce. De cette première saisie, quel type de société peut-on dégager pour demain ? Serons-nous capables d’envisager de vivre sous contrôle après avoir vécu toute cette violence ? Nous avons une chance inouïe pour repenser notre mode de vie, indépendamment du modèle matriciel qui nous attend. De toute évidence, on ne pourra plus se permettre un retour au passé archaïque, fut-il des plus inoffensifs. C’est tout l’enjeu de l’après coronavirus. A quel changement s’attendre in fine? Dieu sait si l’on saura éviter de répéter les mêmes erreurs, de vivre les mêmes bizarreries en se heurtant au lieu commun, au conformisme ? Comment allons-nous retrouver notre humanité ? De quoi sera-t-elle faite ? Rendons les choses un plus explicites ! Cette épreuve n’arrivera pas à suspendre tout jugement. Quelques soient nos hypothèses et nos spéculations, certains auront pour ce monde finissant de la tendresse ou de l’indulgence ; deux vertus à l’assise d’un équilibre éphémère. D’autres courent à l’ébranlement si les choses reprennent le cours actuel. La plupart appelle de ses vœux un changement irréfragable. L’attente est ici encore plus élevée qu’ailleurs. Cette crise arrive à un moment où tout s’essouffle. Il va falloir mettre le cap sur une cité où la vie se substituera à l’artifice. Nous devons penser à une réelle métamorphose. De toute évidence, le retour au giron d’hier ne sera plus possible. La crise nous pousse à regarder le monde autrement, à vivre autrement, à communiquer autrement, à consommer autrement, à communier autrement. C’est une excellente opportunité de remettre les pendules à l’heure. Le temps n’est pas aux tergiversations, aux querelles de chapelles, encore faut-il le clamer haut et fort. Constatons d’ores et déjà, avec ravissement cependant, quelques bienfaits du confinement: la nature reprend ses droits, les animaux retrouvent la paix aux lisières, se hasardent à l’intérieur de notre sphère. Nous avons moins de nuisances sonores dans les rues, l’air est presque pur, le télétravail et d’autres petites choses qui nous ont rendu à nous-mêmes. Nous profitons par ailleurs de notre présence auprès des nôtres. Nous réorganisons l’espace, répartissons les tâches. Nous trouvons du temps pour lire, pour écouter de la musique et tant de choses encore. ‘Tout va bien Mme. la marquise’ ! Il va falloir désormais anticiper sur la prochaine étape. La politique, l’économie et les intérêts risquent de compliquer les données sur lesquelles les pouvoirs doivent assumer leur responsabilité quasiment morale. L’après crise demandera de la créativité, de l’imagination, de l’innovation et du sacrifice. Le pays jouera une grande partie de son destin. Il doit accepter la refonte, individuellement ou collectivement. Il doit démontrer sa capacité à se relever, car l’histoire sera là pour juger, et elle n’épargnera personne. Place donc au changement, mais sans précipitation, sans plans hasardeux, ni foireux. Gardons-nous de revivre les terreurs d’hier. Il nous faut certes plus d’énergie et de résilience pour colmater les fractures, en finir avec les inégalités et retrouver une meilleure cohésion sociale, une concorde qui aura à clouer au pilori les vieilleries au seuil de l’effondrement total. Le changement est inéluctable. Notre mode de vie est désormais en rupture, révèle malgré lui l’insupportable altérité. La débâcle est visible, franchement palpable. La pandémie a certes emporté des vies, paralysé l’économie, sabordé tout élan magnanime, tout souffle communautaire. Elle a au passage discrédité tout un système, écorné quelques certitudes. Comment penser encore que les choses reviendront à la normale ? Que ce qui s’est passé n’est qu’un jeu de rushes d’un mauvais film ? C’est l’occasion inespérée pour remettre tout en question en pensant le collectif. Nous avons vu comment la solidarité a montré son efficacité dans des faits tangibles. Elle serait certainement utile dans un avenir proche où il nous faudra tisser du lien et du bon, un lien qui soit une valeur cardinale capable de transcendance, de sollicitude et d’empathie. Nous pouvons redéfinir les priorités, rabattre les cartes et profiter de cette peur viscérale de la finitude pour réapprendre à vivre, vivre sobrement dans une nouvelle mouture qui serait une meilleure version de nous-mêmes, et surtout la vivre comme une gracieuseté du ciel. Peut-être que dans une prise de conscience ultime et salvatrice nous saurons éviter toute frénésie. Nous saurons nous dépouiller de toute inanité et de tout sentiment égocentrique. La sagesse serait de faire un meilleur usage de ce qui nous est rare et précieux, d’encourager à une hygiène de vie dans le respect de l’environnement. Nous pouvons aussi aller à la dérive, conforter encore plus l’individualisme qui peut nous précipiter vers une lutte âpre pour la survie. Sous les cieux de pays lointains, les nantis ont rejoint leurs bunkers, les moins nantis leurs terriers, rêvant secrètement d’un besoin d’ailleurs hors de ce monde, vidé désormais de sa saveur. D’autres lisent l’Apocalypse et se préparent à une fin imminente. Ils ne savent pas qu’ils ont rendez-vous avec leur propre ensevelissement. Nous n’avons pour l’instant aucune assurance de prendre tout cela de haut. Certes nous ne croyons plus à ce que l’on croyait. Le temps nous est compté. Préservons-nous alors de tout ce qui peut nous dévier d’un projet dont les vertus nous seraient un levain pour vivre utilement et s’élever. Notre mission consisterait à réussir notre transition pour un avenir qui aura à en finir avec les clivages et les inégalités. Nous sommes condamnés à partager le même destin. Le vivre ensemble dans la fusion ou la dissolution. Voyez-vous, le choix étant réduit. Dans le cas contraire, c’est l’émiettement à l’infini. Plus de tromperie ou de galéjades. « Quousque tandem abutere, Catilina, patientia nostre ». Je fais appelle à l’exorde Ex abrupto de Cicéron interpelant Catilina, coupable d’une conspiration. L’apparence, le mensonge, le dévorant complot saccagent, mais mettent à nu les conspirateurs. L’absence de soi est le plus obscur des alibis. Elle ne peut qu’ajourner, que prolonger le sursis. La surséance ne serait en tout cas indéfinie et/ou infinie. Soyons matures, comptables de nos actions ! Chacun peut apporter sa contribution à l’édification d’un nouvel empire, favorable à l’épanouissement de tous. Nous saurons y faire. Le monde d’hier nous aura appris comment un grain de sable est capable de gripper la plus sophistiquée des machines, comment tout un monde peut se fourvoyer, se déliter, impuissant devant l’évènement aveugle qui nous frappe de plein fouet. Cruel rappel! Nous courons le risque de disparaître. N’en déplaise à nos oracles ! Il apparaît évident que notre vie ne sera plus tout à fait la même. Soutenir le contraire, c’est être dans le déni le plus total. La rupture avec le passé est en partie consommée. Nous sommes déjà bouleversés dans notre vie quotidienne, dans notre mouvance, dans notre langage, dans notre rapport à nous-mêmes et aux autres, au temps, à l’espace. Tout a été bousculé, chamboulé. Nous sommes contraints de trouver dans cette configuration des solutions, à défaut des ersatz, même piètres et nous prions qu’ils soient fonctionnels. La digitalisation est peut-être une panacée, mais elle sera bientôt responsable de nouvelles inégalités sociales. Nous payerons plus tôt, et au pris fort la facture d’une telle fracture. Le monde à venir sur lequel nous projetons nos espérances mettra au défi l’humanité de se débarrasser de ses chaînes. Il y a comme une clameur de haro sur ceux qui s’accrochent encore au pouvoir arbitraire, corrompu : Nous sommes aujourd’hui devant un choix historique, en quête de nouvelles interactions sociales capables de recomposer le champ des valeurs et modifier notre référentiel à l’aune d’une interdépendance qui continue d’éclater à même l’épicentre de cet immense remous. Puissions-nous nous souvenir de l’angoisse existentielle qui est la nôtre ! Traçons aussitôt dans nos esprits le schéma rationnel de notre migration. Soyons les chantres naturels d’une époque à venir, une époque pleine de promesses et de prolixité. Trouvons notre incarnation en cet univers qui nous appartient déjà. Entonnons pour lui une antienne, au-delà de l’inaudible. Oublions les déchirements cruels et les morsures muettes du temps révolu ! Car il faut en finir irrémédiablement avec les contorsions douloureuses du passé, les tics épuisants, les solutions bricolées, rafistolées d’étais et de brêlages grossiers. Précisons ! Non, ce n’est pas une opération de ravalement qui nous attend. Nous aurons besoin de tout décomposer pour que l’ancien cours soit recomposé à l’instar d’un Rubik’s Cub, converti, réévalué dans un effort où s’accomplira l’indispensable, car il s’agit de re « naître du plus profond de nous-mêmes à ce qu’il y a de plus profond en nous-mêmes » disait le sage de Thagaste. On se retrouvera de l’autre côté de la berge, on récupérera tout ce à quoi on croyait. Car nous serons sortis du leurre de la différence entre ceux qui vivaient et ceux qui survivaient, du grondement légitime de ceux qu’on a laissé sur le bord de la route, souffrant de l’insipience des maîtres. Ne nions pas notre échec, nous sommes une humanité qui continue à s’interroger, à mesurer, à marquer l’abîme plutôt que le cacher ou le contourner. Rêver un autre monde possible, c’est quitter l’ancien qui croule sous le poids du mensonge et de l’équivoque, celui de la religion soupçonneuse et de la désacralisation. Je serais fort aise d’annoncer son substitut, à l’heure de la relève, quand tout sera divinement accompli. Que cette révolution soit un horizon d’attente favorable à une reconstruction sans privilèges ni calculs. C’est encore une rupture à faire, me dira-t-on. Est-il encore possible de faire place à une autre vérité qui est appelée à tout pulvériser en commençant par ce modèle de société qui a montré ses limites. Ayons le courage d’implanter un viatique qui pourfendra les idoles ! Au foyer des hommes et des femmes de demain, il n’y aura ni saints à glorifier, ni victimes à sacrifier. On laissera dans la fosse commune de l’histoire ceux à qui « Dieu a donné le gouvernail et le diable les voiles », peu soucieux du sort des déclassés, plus séduits par le gain, car peu leur importe la couleur de la manne, obnubilés pour le confort de leur vie matérielle à laquelle ils ont consacré toute une épopée. Ils n’y a pas un seul gibier dont ils ne feraient leur pitance. Ils sont les champions de la manducation. La foi en soi suffira. Elle nous évitera de revivre les mêmes déceptions, la même familiarité dans un mutisme ligaturé. Nous n’allons pas nous perdre dans notre quête d’un possible absolu. Arrimons-nous à du concret, aux valeurs qu’on a perdues faute de vigilance car leur dilution a entraîné des maux incalculables. On ne fera pas que déplacer le carrousel. On découvrira que le jeu ne sera pas aussi facile qu’on pouvait l’imaginer. Le manège nous fera tourner en ronde infernale pour entamer nos dogmes et notre vieille certitude. Il nous sera loisible de changer le modèle antérieur et ses normes. Positivons et allons à la rencontre de nous-mêmes, dans la clarté et la transparence. Excluons le recours à toute nostalgie, offerte comme une consolation. Nous avons besoin de nous retrouver en dehors d’un système qui a manqué d’intelligence et dont les marionnettistes se trouvent aujourd’hui quitte de devoirs, déliés d’actions. Ils ont favorisé les ambitions individuelles plutôt que le dévouement à la collectivité. Ils savent que leur fin leur fera découvrir une vérité amère, sortie droit de leur obséquiosité. Nous aurons fort à faire pour lutter contre les traditions individualistes enracinées dans des habitudes séculaires. Un bouleversement des mentalités éliminera pour sûr tout ce qui porte la marque d’un passé hagiographique, ancré dans un système d’organisation sociale arrivé à sa péremption. Une refonte des superstructures culturelles sera nécessaire pour promouvoir une aire nouvelle, assumée dans une mobilité appuyée sur le seul principe du changement. Cette liquidation annonce et prépare à l’une des aventures les plus prodigieuses de l’histoire. Ne soyons donc ni enragés, ni niais. Nous devons nous recycler autant que faire se peut. Bien sûr qu’il va falloir résister aux orages des statuquos, à l’usure du temps, le temps qui ne doit appartenir qu’aux vivants. Soyons du nombre, décidés et puissants pour le vivre. Le mal et la ‘damnation’ n’ont pas été inutiles. Un nouvel avatar nous interpelle avec toutes les questions profondes qu’il suscite sur la future vie dans ce qu’elle aura de proprement différent du grégarisme. Ce futur ne doit pas être purement prudence : il a déjà fort à faire avec les tenants d’une vision passéiste et combien surannée. Voilà pourquoi il nous faut mettre toutes nos ressources en jeu. Une opération de relecture des faits nous contraint d’ores et déjà à n’être ni manichéens, ni censeurs, encore moins une gerbe de compassions. Le moment est propice pour parcourir les grandes allées de la mémoire collective et faire le tri, afin de mieux nous débarrasser de tout ce qui a trait aux justifications morales. Nous savons à l’analyse que tout se dénoue autour de nous. On ne nous reprochera pas la lumière qui nous fait cruellement voir notre état moribond. Il est temps d’entonner une élégie pour ce présent et ses laquais, à hauteur de leur impudique pharisaïsme auquel la masse s’est assujettie. Notre impudeur, la vraie, est d’être lucide et alerte. Nous n’avons pour cela besoin de provocation. Au bout du tunnel, nous nous retrouverons lovés d’une lumière qui nous transportera dans une dimension qui sera d’une létalité imprévisible aux bruits de bottes et de cravaches. Les janissaires à tête de brute ont commencé à se taire, et leur désarroi est grand. Nos cortèges de cadavres les rattrapent. Sans doute va-t-il falloir éviter les pièges machiavéliques qu’on érigera pour préserver les chasses gardées, les privilèges et les passe-droits. Ces pratiques obscures seront badigeonnées du risible amer. Quoiqu’il en soit, les symptômes apparaissent au fronton de la cité, dès lors justement qu’on en fait l’analyse. Le stigmate de ce pouvoir sera arboré comme une consanguinité tristement majorée. Les faits nous le font entrevoir. Plus de parades, plus de népotisme, plus de calculs, plus de plans, plus de râlerie, plus de soumission ; les rapports se renversent, irréversiblement. Abattons tous les systèmes et gardons quant à nous sens, celui-là même qui touche au mystère de la vie. Vivons l’intensité, la communion. Vivons poétiquement la terre comme l’a osé Hölderlin. Le grand chambardement sera planétaire ou ne sera pas. Tous les voyants l’indiquent. Leur magnétisme est à l’œuvre. Puisse-t-il n’être point un brandon qui empêchera d’aller au bout de soi-même.

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