Un ami m’a fait parvenir cette lecture de mon roman sans me donner plus de détails, à part le fait que l’auteur du texte s’appelle Abdelkrim Jeddi, Prof dans un lycée de la banlieue parisienne. Apparemment, il fut mon étudiant d’une lointaine promotion. Mille fois merci à lui.
Splendeur et disgrâce de Aâbir alias Hans est un roman de l'écrivain marocain Noureddine Bousfiha, qui raconte l'histoire de Aâbir, un personnage complexe, à la fois marginalisé et en quête de sens dans un monde où les valeurs sont souvent perverties.
Le roman est centré sur la vie de Aâbir, qui, dès son enfance, semble être victime d’une sorte de destinée tragique. Né dans un environnement difficile, il traverse des épreuves qui façonnent son caractère. En quête d’identité et d’acception, il adopte un autre nom, celui de Hans, une transformation qui reflète son désir d'échapper à sa condition et de se reconstruire ailleurs.
À travers le parcours de Aâbir, le roman explore des thèmes profonds comme l’aliénation sociale, la recherche d'identité, le rapport à la culture et la quête de rédemption. Le récit met en lumière les contradictions de la société marocaine, les tensions entre modernité et tradition, ainsi que les défis des individus dans une époque de changements rapides.
Les personnages qui croisent le chemin de Aâbir jouent un rôle clé dans son évolution, l'aidant ou le freinant dans son voyage intérieur. Le roman se déploie à la fois comme un récit d’apprentissage, mais aussi comme une critique sociale acerbe. Il y a d’abord Aârab, un personnage charismatique qui joue un rôle symbolique et concret. Il est le leader d'un groupe d'acrobates, les Sidi H’mad ou moussa qui lui offrent la possibilité de quitter Marrakech pour un contrat dans un cirque en Allemagne. Le rôle d’Aârab va au-delà de celui d'un simple chef de groupe : il incarne un modèle de liberté, d'indépendance, mais aussi de vie soumise à des contraintes particulières.
Aârab agit comme un guide pour Aâbir, l’aidant à comprendre certaines dynamiques de la vie, mais aussi à développer une forme d’acceptation et de résilience face aux difficultés et aux injustices qu'il rencontre. À travers la relation entre Aârab et Aâbir, le roman met en lumière l’importance de la solidarité et de la fraternité dans des contextes de marginalisation. Aârab, offre à Aâbir une forme de communauté, un espace où il peut se réinventer et se reconstruire, loin des normes sociales oppressantes.
Les acrobates, avec leur mode de vie particulier, représentent aussi un microcosme du monde plus large dans lequel Aâbir cherche sa place. Aârab, en tant que chef, symbolise à la fois l’autonomie et la lutte pour l’existence dans un monde où les individus doivent constamment naviguer entre splendeur et disgrâce, entre aspiration à la liberté et réalité de la précarité. Il est ce mentor, un modèle qui offre à son ami à la fois un espace d’appartenance et un exemple de résistance face à l’oppression sociale. Il est aussi un personnage qui aide Aâbir à mieux comprendre les notions de liberté, de solidarité et de quête de sens dans un monde incertain.
Puis il y a Katerina qui va jouer un rôle crucial dans l'évolution du personnage de Aâbir. Elle incarne à la fois un miroir et un catalyseur de transformation pour ce dernier.
Katerina est un personnage complexe, qui représente un idéal inaccessible et, en même temps, une réalité étrangère au monde de Aâbir. Elle est un symbole de beauté, de désir et de distance. Leur relation, qu'elle soit d'amour, de désir ou de compréhension, permet à Aâbir d'explorer et d'affronter ses propres contradictions et son identité fragmentée.
À travers sa relation avec Katerina, Aâbir est confronté à des questions de classe sociale, de culture et de reconnaissance. Katerina devient, pour lui, une sorte de "complice" de son voyage intérieur, l’incitant à remettre en question ses choix de vie, son passé et ses rêves. Elle incarne aussi un type de "fuite" ou d'évasion, un idéal qu’il ne peut atteindre, ce qui renforce le sentiment d’impuissance et de frustration du personnage principal.
De manière plus symbolique, Katerina incarne également une sorte d’altérité, représentant un monde extérieur, peut-être plus moderne ou plus ouvert, mais aussi distant et difficile à atteindre pour un homme comme Aâbir, qui se trouve pris dans les rouages d’une société souvent fermée et rigide.
Dans un jeu de miroir, Katerina déclenche la quête de sens de Aâbir. Elle sert à la fois d’inspiration et de renforcement de ses dilemmes intérieurs, tout en contribuant à mettre en lumière sa quête d’évasion, de rédemption et de réconciliation avec lui-même.
En résumé, « Splendeur et disgrâce de Aâbir alias Hans » est une œuvre marquée par une profonde réflexion sur l’identité personnelle et collective, tout en offrant une critique des injustices sociales et des luttes intérieures des individus face aux attentes sociales et familiales. C'est une exploration poignante des limites de la dignité humaine dans un monde souvent indifférent.
Abdelkrim Jeddi